Il y aurait dans le projet Faux semblants une intention allégorique, celle
d’essayer de montrer à l’aide d’un contenu, par certains endroits abstraits, un ensemble d’œuvres qui viennent témoigner d’un imaginaire dédoublé. Nous parlons ici d’une mise en lumière de l’étrange et des apparences trompeuses et parfois drôles. L’allégorie reste, depuis une quarantaine d’années, une zone interdite du champ de l’art, le lieu d’une aberration qui en ferait, comme l’exprime Borges une « erreur esthétique ». A la manière d’une réécriture, l’allégorie fonctionne dans l’œuvre d’art comme un commentaire, une relation qui se noue dans l’objet et parfois au regard d’un sujet ou d’un sentiment, lieu qui s’est fait malheureusement l’interdit.
Comment distinguer le semblant du faux semblant ? Au-delà de l’exposition ici présentée il s’agirait de trouver la réponse dans ce qui forme le discours de l’œuvre et cela en relation avec son sujet. Les trois artistes réunis à la Traverse jouent à leur manière des écritures multiples : l’algorithme, la mémoire et le lieu ou encore les identités plurielles des auteurs. Il y a dans l’appropriation d’une image, ou son appréciation, un jeu initial du faux semblant dans la distance entre le titre et l’œuvre, la distance entre la lecture et le ressenti, celle aussi qui vient se situer entre l’œuvre et notre envie de la comprendre ou de l’interpréter. Forme de rébus, dans cette écriture difficile à saisir, les travaux nous parviennent avec notre regard critique et nos désirs de compréhension. Que souhaite nous raconter Tomasz Machciński au travers des milles visages qu’il recouvre ? De quoi témoigne Hanna Martinelli au prisme des jeux de langage et de texture de ses travaux ? Quelle fiction est construite par Anna Solal entre mathématique et reliquaire technologique ? Faux semblants espère ici mettre en lumière un mécanisme propre à la création contemporaine : le jeu qui devrait nous permettre de « lire les signes » et de les interpréter.